Fnac: Livraison gratuite dĂšs 20 CHF d'achat. Tout sur Fais pas ci, fais pas ça Coffret intĂ©gral de la Saison 6 - DVD - Bruno Salomone - Isabelle GĂ©linas, DVD Zone 2 et toute l'actualitĂ© en Dvd & Blu-ray. Regarderen plein Ă©cran. il y a 2 ans. EXTRAIT - Sheila : "MĂȘme si on ne m'aime pas, je fais partie de la vie des gens" Cdiscount- DĂ©couvrez notre offre Cd fais pas ci, fais pas ca. Livraison gratuite* | Paiement sĂ©curisĂ© | 4x possible | Retour simple et rapide Votre navigateur internet n’est plus supportĂ© par notre site. Afin de bĂ©nĂ©ficier d’une navigation optimale, merci de mettre Ă  jour votre navigateur. Jesuis curieux de voir l'Ă©volution de tout ça. - page 3 - Topic Fais pas ci, fais pas ça. du 16-11-2007 16:57:29 sur les forums de jeuxvideo.c CONNEXION Retour Jeux Faispas ci, fais pas ça; Fais pas ci, fais pas ça Christian Guibbaud (Auteur) Paru en avril 2008 Album jeunesse dĂšs 3 ans (brochĂ©) 5. 1 avis . Occasion - État : Correct. Correct 6,84 € Occasion - État : Correct Couverture, dos, coins, et pages intĂ©rieures pouvant ĂȘtre endommagĂ©s (coins cornĂ©s par exemple). RetrouvezFais pas ci, fais pas ça et des millions de livres en stock sur Amazon.fr. Achetez neuf ou d'occasion Recherche dĂ©taillĂ©e Meilleures ventes NouveautĂ©s Romans et polars BD Enfants et ados Scolaire et Ă©tudes SantĂ© et bien-ĂȘtre Loisirs et culture Livres en VO Le livre autrement Livres XTc8s7t. Autant, faire des erreurs avec des multiprises c’est pas trĂšs grave au pire on risque juste de foutre le feu chez soi. Autant faire des erreurs avec des capotes ça peut ĂȘtre trĂšs grave. Et nous allons le dĂ©couvrir tout de go. 1. Le garder aprĂšs l'Ă©jaculation AprĂšs avoir fait du sexe on a parfois la flemme de virer ce morceau de plastique dignement rempli d’une substance musquĂ©e et de chiller avec des muqueuses encore trĂšs proches. C’est une erreur tout simplement parce que les fluides peuvent s’échapper de la capote et se retrouver en contact avec ton ou ta partenaire. Du coup, c’est un peu comme si ça servait Ă  rien d’avoir mis des capotes pendant toute la partie de sexe et ça, ça fout vraiment la chienne. Quant aux personnes trĂšs Ă©tranges qui gardent leur capote plusieurs mois aprĂšs leur dernier rapport sexuel, sachez que non seulement je les respecte, mais qu’en plus je vois pas pourquoi je devrais l’enlever alors que ça tient super chaud Ă  mon kiki. 2. Mettre des capotes de merde Allez c’est bon lĂ Ă Ă Ă  faites pas vos radasses avec les prĂ©servatoches. A moins de niquer 5 fois par jour, ça reste un budget accessible et on vous conseille donc de fuir la sous-marque si vous voulez Ă©viter les craquages de plastique trĂšs agaçants en plein rapport sexuel. 3. Ne pas avoir de capotes sur soi Les gars, la capote c’est jusqu’à preuve du contraire le meilleur moyen de lutter contre la transmission d’IST. Donc peu importe que vous soyez en couple ou pas, que vous ayez prĂ©vu de pĂ©cho ou pas, que vous ayez vos rĂšgles ou pas, que vous soyez Ă©pilĂ©s du SIF ou pas, il n’est jamais inutile d’avoir une capote nichĂ©e dans son sac. Si vous ne l’utilisez pas, vous pourrez toujours dĂ©panner quelqu’un ou faire en dernier recours une bombe Ă  eau afin de compenser votre frustration sexuelle. 4. Ou le virer trop tĂŽt Il y a des gens un peu teubĂ©s posons les termes qui virent leur capote avant la fin du rapport sexuel. Genre Ă  quel moment ? Faites pas ça bordel, jouez pas aux cons. 5. Mettre des capotes pas Ă  sa taille Inutile de lutter contre la rĂ©elle taille de ton pĂ©nis. Porter des capotes trop petites ou trop grandes rendra non seulement le rapport dĂ©sagrĂ©able mais surtout risquĂ©. 6. MĂȘme pour les fellations la capote est recommandĂ©e Certes, on ne risque pas de tomber enceinte en se livrant Ă  l’art de la peu-pi, mais les IST sont tout autant transmissibles par voie orale, donc il y a nĂ©cessitĂ© Ă  se protĂ©ger, mĂȘme pour les prĂ©liminaires. 7. Garder ses capotes dans son portefeuille Il ne faut pas stocker ses capotes n’importe oĂč. En tĂȘte de liste des lieux qu’il faut le plus Ă©viter le portefeuille, la poche. Et c’est un peu couillon parce que c’est en effet lĂ  oĂč on les garde le plus. Dans un portefeuille, l’emballage de la capote peut s’abĂźmer il va sans dire qu’un emballage perforĂ© est inacceptable et dans la poche, l’efficacitĂ© de la capote peut ĂȘtre altĂ©rĂ©e par la chaleur du corps. Or les capotes c’est comme les bonnes bouteilles de pinard, il faut les conserver Ă  l’abri de la lumiĂšre, de la chaleur et de l’humiditĂ©. 8. Mettre deux capotes Ça peut sembler fou, mais il existe des gens qui ont ce genre de rĂ©flexes chelous. Si tu fais partie de ces Ă©tranges hurluberlus, sache que tu te fourvoies dans l’erreur. A moins d’avoir deux teubs, il est inutile d’enfiler deux capotes. 9. Ne pas vĂ©rifier la date de pĂ©remption Les capotes c’est pas comme le chocolat. On doit faire vraiment gaffe Ă  la date de pĂ©remption, car au-delĂ  de celle-ci, la capote peut craquer. Trop craquante en faitch. 10. Ne pas utiliser de lubrifiant ALERTE GENERALE INFORMATION PRIMORDIALE D’URGENCE MAXIMALE Il est tout Ă  fait normal d’utiliser du lubrif’ et surtout quand on met des capotes. Soyez juste pas couillon en foutant du lubrifiant Ă  l’intĂ©rieur de la capote ce qui ne sert Ă  rien. Bref, lubrifiant fuel for life. BientĂŽt, on vous servira un top sur les erreurs Ă  ne pas faire avec sa capote de voiture. Ce sera beaucoup moins interessant. L'histoire à succÚs cachée derriÚre la tragédie de Lac-Mégantic est la volonté du chef pompier Denis Lauzon. Avant la tragédie, il faisait pression sur le conseil municipal pour adopter un plan d'intervention d'urgence sachant que du pétrole traversait le centre-ville. À travers les années, ce plan d'urgance ne fut pas la priorité du conseil. Toutefois, sachant le risque encouru, M. Lauzon savait que tÎt ou tard un accident allait se produire. Alors, il a travaillé conjointement avec le chef pompier de la Ville de Sherbrooke pour élaborer un plan sans l'appui du conseil. C'est ainsi que des ententes avec Valéro anciennement la raffinerie Ultramar à Lévis, ont pu ÃÂȘtre réalisées. Quand cas d'urgence, les camions-citernes de la raffinerie seront prÃÂȘt à intervenir des camions propres aux feux d'hydrocarbure.Il a réalisé une entrevue détaillant ces faits, mais je ne la retrouve plus. Cet article date de plus de cinq ans. Depuis 4 saisons, la sĂ©rie tĂ©lĂ©visĂ©e "Fais pas ci fais pas ça", créée par Anne Giafferi et Thierry Bizot, prĂ©sente les aventures des familles Bouley et Lepic, sous la forme d'un faux reality show. Et c'est donc la saison 5 qui dĂ©barque ce mercredi soir sur les petits Ă©crans français, oĂč l'on retrouve ces deux couples aux prises avec leurs enfants qui grandissent et leurs dĂ©boires personnels. Article rĂ©digĂ© par PubliĂ© le 06/12/2016 0630 Temps de lecture 1 min. Le ressort comique de cette sĂ©rie, en plus des dialogues piquants et du cĂŽtĂ© "familier" toujours apprĂ©ciĂ© par le grand public qui aime pouvoir s'identifier aux personnages, est Ă©galement basĂ© sur les diffĂ©rences sociales entre ces deux couples. D'un cĂŽtĂ© Les Bouley plutĂŽt "bobo", et plutĂŽt cools avec l'Ă©ducation de leurs enfants. De l'autre les Lepic, jouĂ©s par Guillaume de TonquĂ©dec et ValĂ©rie Bonneton, sont d'un milieu plus modeste, et comptent sur des valeurs fondamentales trĂšs strictes pour gĂ©rer leur tribu de quatre enfants. "Fais pas ci fais pas ça" - les deux premiers Ă©pisodes ce mercredi Ă  partir de 20h45 sur France 2 Prolongez votre lecture autour de ce sujet tout l'univers Théùtre J’aime lire Max 277 est arrivĂ© ! En janvier dans J’aime lire Max Pour la nouvelle annĂ©e, on a fait les choses en grand, rien que pour toi ! Aux cĂŽtĂ©s de Madelon et Antonio, on t’invite Ă  parcourir le chĂąteau de Versailles. Eh oui, rien que ça ! LĂ -bas, mĂȘme en hiver, ... J’aime lire Max 276 est arrivĂ© ! En dĂ©cembre dans J’aime lire Max Ça y est, la pĂ©riode prĂ©fĂ©rĂ©e de l’équipe de J’aime lire Max est lĂ  ! Laquelle ? Oh, ne fais pas l’innocente, tu sais trĂšs bien que c’est de NoĂ«l qu’on parle ! Cette annĂ©e, on a Ă©tĂ© trĂšs sages, ... J’aime lire Max 273 est arrivĂ© ! En septembre dans J’aime lire Max Une nouvelle annĂ©e scolaire dĂ©bute Ne fais pas la tĂȘte, oui les vacances s’achĂšvent, mais plein de super trucs se profilent retrouver tes copains et tes copines, reprendre ton activitĂ© prĂ©fĂ©rĂ©e ou ... J’aime lire Max 272 est arrivĂ© ! En aoĂ»t dans J’aime lire Max Avec un an de retard, les Jeux olympiques sont enfin lĂ  ! Du 23 juillet au 8 aoĂ»t, on va pouvoir vibrer pour les athlĂštes français. Pour fĂȘter ça, la rĂ©dac’ t’a prĂ©parĂ© un bricolage Ă©patant pour organiser un super ... J’aime lire Max 275 est arrivĂ© ! En novembre dans J’aime lire Max Le moment est venu de se faire peur ! Sors tes araignĂ©es en plastique, ton faux sang, et tes dĂ©guisements qui collent la frousse. Halloween, c’est LA fĂȘte lors de laquelle tu peux te lĂącher et faire hurler ... J’aime lire Max 274 est arrivĂ© ! Auteur ou autrice de BD voilĂ  un mĂ©tier qui fait rĂȘver ! Eh bien, ce mois-ci, nous t’offrons la possibilitĂ© de te prendre pour un as de la BD en participant au Grand Concours BD 2022 avec Les Sisters. À toi d’inventer un gag puis de le ... J’aime lire Max 271 est arrivĂ© ! En juillet dans J’aime lire Max PrĂȘte pour un voyage dans le temps et dans l’espace ? Ce mois-ci, J’aime lire Max t’embarque pour une aventure pas comme les autres, avec une hĂ©roĂŻne plus toute jeune, mais terriblement sympa ... J’aime lire Max 270 est arrivĂ© ! En juin dans J’aime lire Max La fin de l’annĂ©e scolaire se profile, lĂ -bas au loin
 Tu vas dire “bye bye” au maĂźtre ou Ă  la maĂźtresse qui t’a accompagnĂ©e cette annĂ©e. Tous les ans, c’est pareil, ce professeur, tu le vois tous les jours, tu ... Xavier Guilbert Pour commencer — tu as exposĂ© durant une Biennale d’Art Contemporain, aujourd’hui tu es exposĂ© dans un musĂ©e d’histoire, dans le cadre d’un festival de bande dessinĂ©e. Toi-mĂȘme, oĂč te positionnes-tu par rapport Ă  tout cela ? Jochen Gerner un silence Le positionnement ne vient pas forcĂ©ment en se disant comment ça va fonctionner dans tel endroit ou dans tel lieu. Je fais des choses, et ensuite, cela atterrit Ă  un endroit, que ce soit dans une biennale, dans un musĂ©e, dans une galerie, chez un libraire. Il n’y a pas du tout de rĂ©flexion comme ça c’est-Ă -dire que je mets tout au mĂȘme niveau. Et effectivement, il y a des dessins qui tiennent bien le mur, d’autres qui tiennent moins bien le mur. Il y a des choses que je pense principalement pour des expositions et dont je ne vais pas forcĂ©ment faire une Ă©dition, et donc il y a des choses que je vais faire pour des livres et qui vont bien marcher sous forme de pages mais qui ne fonctionneront pas, selon moi, pour un projet d’exposition. Xavier Guilbert Tu te dĂ©finirais comment ? Jochen Gerner Avant tout, je me dĂ©finis comme dessinateur-auteur. Mais aprĂšs, c’est difficile de rentrer plus loin dans les dĂ©tails, puisque on peut dire plasticien, bĂ©dĂ©aste, etc. Mais en fait, dessinateur-auteur, pour moi, c’est ce qui me correspond le plus. C’est-Ă -dire de travailler par le biais de l’image, du dessin, sur les rapports entre l’écrit et l’image, et ça, ça peut s’adapter Ă  tous les cas de figure de mes interventions. Aussi bien comme dessinateur de presse, puisque je fais toujours des dessins pour la presse, que auteur de bande dessinĂ©e, ou alors auteur de sĂ©ries de dessin pour des lieux d’exposition plus liĂ©s au monde de l’art contemporain. Xavier Guilbert En ce qui me concerne, je t’ai dĂ©couvert par le biais des strips que tu faisais pour Les Inrockuptibles, qui ont Ă©tĂ© repris dans les Courts-Circuits GĂ©ographiques. Entre ces travaux et ce qui est exposĂ© ici, il y a deux livres qui me semblent marquer une Ă©tape, qui sont tous les deux parus en 2000 Un temps., publiĂ© Ă  l’Association et dans lequel tu parles d’une attente dans un aĂ©roport qui t’amĂšne Ă  inventorier tout un tas de choses ; et puis paru au Rouergue, Berlin Jochen-platz — dĂ©jĂ , le titre est intĂ©ressant parce qu’il y a cette idĂ©e de gĂ©ographie personnelle, mais on y retrouve aussi une grande thĂ©matique de ton Ɠuvre, qui est l’idĂ©e d’inventaire, de taxonomie, de classification. Comment en es-tu venu lĂ  ? Jochen Gerner Sans doute, je suis plus dans une sorte d’observation des choses. Aussi bien des choses du monde dont on nous parle, des gens, toutes sortes de choses aussi bien du monde vĂ©gĂ©tal, ou gĂ©ologique, par rapport au titre de cette exposition. Mais c’est vraiment une approche d’observation, un peu comme une sorte de reportage journalistique, ou alors comme un scientifique qui fait des Ă©tudes, et qui regarde au microscope une matiĂšre donnĂ©e. Plus que comme un auteur — si j’étais auteur de bande dessinĂ©e, et que je faisais de la fiction. Je ne fais pas du tout de fiction, je ne dis pas que ça ne m’intĂ©resse pas, mais je ne m’en sens pas la capacitĂ©, parce que je ne suis jamais allĂ© dans cette direction-lĂ , je ne me suis jamais entraĂźnĂ© Ă  cet exercice-lĂ . Et j’aime bien travailler Ă  partir de contraintes. Travailler Ă  partir d’une matiĂšre premiĂšre donnĂ©e, qui va dĂ©cider aprĂšs de la forme du livre. Pour moi, dans la fiction, il y a un peu un aspect dĂ©miurge on invente un monde, qui sort entiĂšrement de notre tĂȘte, et je ne m’en sens pas la force et la capacitĂ©. Du coup, parfois, quand je fais de la fiction, c’est Ă  partir de scĂ©narios d’autres personnes. Je le fais rarement, et de plus c’est Ă  partir de scĂ©narios de gens que je connais bien, donc je sais que je vais pouvoir m’amuser avec eux Ă  ça. Mais ce qui m’intĂ©resse principalement, c’est vraiment ce travail d’étude, et c’est pour cela qu’il y a cette sorte de classification j’essaie de tout reprĂ©senter, que mon sujet d’étude soit aussi bien la bande dessinĂ©e elle-mĂȘme, donc rĂ©flĂ©chir sur le mĂ©dium, qui est Ă  la fois mon outil de travail, que tout autre chose. Que ce soit une photo, un catalogue d’ameublement ou une carte postale — le sujet peut ĂȘtre vraiment trĂšs divers. Et mĂȘme, je peux m’intĂ©resser Ă  des choses qui ne m’intĂ©ressent pas. J’ai toujours eu, comment dire ? ce rĂ©flexe d’aller vers les choses que je ne connais pas. Principalement, plutĂŽt, pour essayer de faire des dĂ©couvertes, d’aller vers des territoires — imaginons que je suis quelqu’un qui dĂ©couvre un pays, je vais plutĂŽt aller vers la zone qui n’a pas encore Ă©tĂ© explorĂ©e, je vais toujours essayer de m’écarter des chemins qui me semblent un petit peu dĂ©jĂ  balisĂ©s. Il y a toujours ce truc-lĂ  d’ĂȘtre dans la dĂ©couverte — mĂȘme quand je fais, par exemple, un travail sur Tintin je vais essayer de chercher qu’est-ce qui peut ĂȘtre nouveau, Ă  dĂ©couvrir, dans cette Ɠuvre-lĂ , et comment passer de l’autre cĂŽtĂ© de la page, de l’autre cĂŽtĂ© du mur. Un peu Alice qui, Ă  travers un anfractuositĂ©, dĂ©couvre un monde parallĂšle, moi, j’ai vraiment cette sensation-lĂ . Tout d’un coup, voir des potentialitĂ©s, des choses dans la matiĂšre imprimĂ©e — puisque je m’intĂ©resse, plus qu’à l’original, vraiment au support livre, au support imprimĂ© — et par la trame, par les reflets, par les petites choses qui se passent dedans, je me dis qu’il est possible de faire de nouvelles dĂ©couvertes. Xavier Guilbert Tu parlais de Tintin — c’est bien sĂ»r pour TNT en AmĂ©rique. C’est un projet qui, selon le quatriĂšme de couverture, commence en 2001 et que tu termines en 2002. On a donc, autour de 200, ces deux grandes tendances qui sont aujourd’hui trĂšs prĂ©sentes dans ton Ɠuvre qui se mettent en place. Jochen Gerner Oui, c’est comme si — je suis sorti de l’école des Beaux-Arts en 1993. Et quand on sort de l’école, il faut commencer Ă  travailler pour vivre, rĂ©pondre Ă  des commandes, des choses comme ça. J’ai rencontrĂ© aussi l’Association aussi, j’ai commencĂ© Ă  faire un rĂ©cit de voyage pour eux. En fait, il y a un certain nombre d’annĂ©es — je ne suis pas Ă  sortir de l’école, Ă  faire mon premier livre, et hop ! c’est le succĂšs. Ce n’est pas du tout ça qui s’est passĂ©. C’est juste qu’il y a une sorte de temps d’attente, oĂč l’on fait des dĂ©couvertes, et c’est un temps assez incompressible, avant de savoir vraiment ce que l’on va faire. Et effectivement, en 2000 — et d’ailleurs suite Ă  une discussion avec Olivier Douzou[1] Ă  Bastia, que je lui ai dit voilĂ , je pense Ă  une sorte d’étude, je ne sais pas Ă  quoi cela va ressembler, sur Tintin en AmĂ©rique, par rapport, justement, Ă  la violence que j’avais dĂ©celĂ©e dans cet album, par rapport Ă  ce qui Ă©tait racontĂ©, et faire un parallĂšle avec l’AmĂ©rique quelque chose de beau, de lisse en apparence, comme la ligne claire, en fait, mais de violent et de plus trouble de maniĂšre souterraine. Mais je ne savais pas comment cela aller fonctionner, et donc j’ai commencĂ© Ă  travailler sur les mots, sur la matiĂšre textuelle, en recouvrant de noir toute la page, l’une des pages de cet album, pour ne laisser Ă  dĂ©couvert que les mots qui m’intĂ©ressaient. Et finalement, je me suis rendu compte que graphiquement, j’étais en train de faire quelque chose. Sauf que c’était quelque chose de trĂšs austĂšre, puisqu’il y avait une page noire, et juste quelques mots isolĂ©s. C’était un peu abrupt, comme intervention. Du coup, je me suis demandĂ© s’il n’était pas possible de laisser des petites zones Ă  dĂ©couvert qui viendraient rĂ©pondre aux mots que j’avais isolĂ©s. De ne pas recouvrir toute la page, mais aussi laisser de petites zones de couleur et dĂ©couper en nĂ©gatif des petits visuels, des petits pictogrammes. En faisant cela, je me suis rendu compte que finalement, cela Ă©clairait la page, comme si l’on regardait un paysage de nuit, avec des petites lumiĂšres qui petit Ă  petit, s’allumaient comme des nĂ©ons, comme dans une ville amĂ©ricaine, et en mettant toutes les pages les unes Ă  cĂŽtĂ© des autres, cela donnait une sorte de ville, un panoramique de Los Angeles ou de New York. Cela m’a intĂ©ressĂ© d’axer le projet comme ça. Cela correspondait aussi Ă  mes premiĂšres participations Ă  l’OuBaPo, et la rĂ©alisation d’une exposition de l’OuBaPo, l’Ouvroir de Bande dessinĂ©e Potentielle, Ă  la Galerie Anne Barrault, Ă  Paris, qui est une galerie d’art contemporain. J’ai donc fait connaissance de la galerie Ă  ce moment-lĂ , qui m’a demandĂ© plus tard de faire une exposition de ce travail. A partir de ce moment-lĂ , j’ai fait une rĂ©flexion Ă  la fois sur la maniĂšre de prĂ©senter les dessins, au sein d’une exposition, sur un mur, et en mĂȘme temps de rĂ©flĂ©chir au support livre. Pour moi, dans la bande dessinĂ©e, l’important, l’original, l’Ɠuvre» finale, c’est le livre. C’est le soin apportĂ© Ă  la prĂ©sentation du livre, aux pages de garde, au dos toilĂ©, au moindre dĂ©tail prĂ©sent dans le livre. Plus que pour l’exposition des planches originales, oĂč lĂ  il y a plus un intĂ©rĂȘt documentaire sur la maniĂšre dont est faite une bande dessinĂ©e, avec le crayonnĂ©, les petites choses dans la marge, ça, c’est trĂšs intĂ©ressant par rapport Ă  ce que l’on voit au MusĂ©e de la Bande DessinĂ©e. Xavier Guilbert C’est ce qui fait Ă  mon sens que TNT, dans sa version reliĂ©e, est plus l’Ɠuvre aboutie que les planches que l’on va pouvoir voir exposĂ©es
 Jochen Gerner Disons que c’était autre chose. Ce n’est pas du tout le mĂȘme objet. LĂ , le livre est vraiment une sorte d’étude, plus par rapport au texte, mais en plus, lĂ  les mots ont Ă©tĂ© changĂ©s pour des problĂšmes de droits, j’ai réécrit tous les mots, pour que ce ne soit pas l’écriture de HergĂ©, pour ne pas avoir de procĂšs. Xavier Guilbert Dans les originaux que j’avais vus, ce qui m’avait marquĂ©, c’est que la seule chose qui restait d’immĂ©diatement reconnaissable, c’était le numĂ©ro des pages, avec le cercle. C’était donc pour des questions de droits
 Jochen Gerner Oui oui, parce que l’écriture manuscrite de HergĂ©, c’est son dessin aussi. Alors que finalement, ce qui est reproduit ici, ce n’est que la couleur. Et puis, mentalement, l’idĂ©e qu’il y a toutes les planches de HergĂ© sous ce noir. Et encore, pour l’édition, c’est un noir qui a Ă©tĂ© complĂštement refabriquĂ© par rapport aux originaux, donc c’est un noir tout plat. Xavier Guilbert C’est vrai que sur les originaux, il y a une sorte de transparence. Jochen Gerner Oui, avec l’encre de Chine. Et puis il y a la texture du papier, il y a plein de choses en fait. Mais par rapport Ă  l’exposition des originaux, on voit toute cette rĂ©flexion sur l’idĂ©e de ville et de panorama, alors que lĂ , on l’a beaucoup moins. Xavier Guilbert Par contre, ce qui est intĂ©ressant, c’est le circuit que l’on observe. Parce que l’on part d’une matiĂšre bande dessinĂ©e», qui va exister dans le cadre d’une crĂ©ation d’art contemporain, et qui redevient un livre que l’on peut ranger Ă  cĂŽtĂ© des Tintin. Puisque la forme est effectivement un format cartonnĂ©-toilĂ©, comme l’étaient les Tintin de l’époque, avec un choix au niveau des couleurs des pages de garde qui Ă©voquent cette forme prĂ©cise. On est dans le dĂ©tournement, et celui-ci n’est finalement complet que dans la version imprimĂ©e. Jochen Gerner Oui, c’est ça, ce n’est pas prĂ©sent dans la version exposĂ©e. Mais lĂ -aussi, c’est pour des raisons de droits, j’ai enlevĂ© tous les portraits de HergĂ©. Donc non seulement je les volais», puisque j’enlevais tous les tableaux qui Ă©taient prĂ©sents sur ce papier peint, mais en mĂȘme temps je rĂ©solvais ce problĂšme de droits de reproductions. J’ai redessinĂ© moi-mĂȘme ce motif-lĂ , on a repris juste les couleurs. Xavier Guilbert Pourquoi Tintin ? Jochen Gerner Tintin ? Ce n’est pas forcĂ©ment parce que je suis un fan absolu de Tintin. C’est plus que Tintin, pour moi, c’est important. Je peux ĂȘtre autant admiratif que critique sur certains albums, je ne suis pas fan absolu du tout. Mais c’est plus en tant qu’auteur de bande dessinĂ©e, en tant qu’OuBaPien, donc rĂ©flĂ©chissant sur le mĂ©dium bande dessinĂ©e», on ne peut pas se permettre de passer Ă  cĂŽtĂ© de Tintin. Il faut l’intĂ©grer, comme une sorte de monument visible, et qu’on ne peut pas Ă©viter, et c’est trĂšs intĂ©ressant. De plus, la ligne claire de HergĂ© se prĂȘte Ă  Ă©normĂ©ment de dĂ©tournements, et il y a quelque chose qui est trĂšs facile Ă  exploiter. Des choses trĂšs intĂ©rieures, que l’on peut faire remonter Ă  la surface, ce qui n’est pas forcĂ©ment possible pour toutes les bandes dessinĂ©es. Xavier Guilbert Si je pose la question, c’est parce que quand on considĂšre les autres Ă©lĂ©ments que tu utilises pour ces dĂ©tournements, il y a une sorte de — je ne sais pas si c’est une dĂ©sacralisation de Tintin, mais tu as travaillĂ© sur le catalogue IKEA
 Jochen Gerner IKEA, c’est pareil. Ce n’est pas que je sois fan de IKEA et que je lise le catalogue tous les matins, mais c’est juste que le catalogue IKEA est ce qui se vend le plus de par le monde, plus que la Bible. En fait, la maquette, c’est la mĂȘme pour tous les pays du monde. J’ai travaillĂ© sur la version amĂ©ricaine. Et ça m’intĂ©resse, parce que voilĂ , pour le symbole. HergĂ©, c’est la mĂȘme chose. Martine, c’est pareil je ne lis pas Martine, je ne l’achĂšte pour mes enfants, mais c’est quelque chose qui m’intĂ©resse parce que c’est quelque chose qui est prĂ©sent et important. En plus, c’est plus facile de dĂ©tourner et de parler de quelque chose qui est, de maniĂšre sous-jacente, connu de un petit peu tout le monde, alors que si je travaillais sur quelque chose de trĂšs peu connu, trĂšs underground, et si mĂȘme j’en faisais un dĂ©tournement, ce serait plus difficile pour quelqu’un de voir le chemin que j’ai fait. Xavier Guilbert En mĂȘme temps, il y a aussi le Panorama du Feu ou Abstraction qui partent de petits formats. LĂ , on est plutĂŽt dans le rĂ©cit de guerre
 Jochen Gerner Les rĂ©cits en question ne sont pas forcĂ©ment connus, mais on connaĂźt ce mouvement, enfin ce genre littĂ©raire et ce genre de bande dessinĂ©e qui est le petit format des annĂ©es 50 Ă  70, qui Ă©tait un genre en lui-mĂȘme. MĂȘme les auteurs ne sont pas citĂ©s — pour Abstraction, j’ai dĂ©tournĂ© une bande dessinĂ©e dont je n’ai mĂȘme pas eu la possibilitĂ© de retrouver l’auteur. Il n’était pas du tout crĂ©ditĂ© dans le rĂ©cit. Ce qui m’intĂ©ressait, c’était de faire le lien avec ce qui se passait aux États-Unis au mĂȘme moment, avec l’Art Moderne, l’abstraction, l’expressionnisme abstrait, et cette bande dessinĂ©e, qui n’avait strictement rien Ă  voir. Sauf qu’il y avait des petits dĂ©tails dans ce rĂ©cit, qui est un rĂ©cit de guerre de la Seconde Guerre Mondiale. C’était une petite bande dessinĂ©e qui Ă©tait parue en 1968, et il y avait des petites infos qui me faisaient penser vraiment directement Ă  une sorte de gestuelle graphique qui Ă©tait prĂ©sente dans les toiles amĂ©ricaines de la pĂ©riode aprĂšs-guerre. Du coup, je me suis dit que ce dessinateur-lĂ , il avait fait ça sans se rendre compte qu’il faisait rĂ©fĂ©rence Ă  ces mouvements-lĂ . J’ai alors dupliquĂ© ce petit signe sur toute la case, en essayant de cacher la plupart des choses prĂ©sentes sur la case, en gardant un mot qui servirait de lĂ©gende pour cette image abstraite, et donc d’essayer de rĂ©tablir une sorte de fil invisible qui existait de maniĂšre inconsciente et involontaire de la part de l’auteur original pour construire ce projet. J’ai mĂȘme fait tout le livre sans mettre d’image, pour que cela ressemble Ă  un catalogue, un petit catalogue de courant artistique, en mettant le titre le plus austĂšre possible Abstraction, 1941-1968». 1941, cela correspond Ă  la date de l’histoire racontĂ©e, donc une bataille navale de la Seconde Guerre Mondiale, et 1968, Ă  la date de parution de la bande dessinĂ©e. C’est ainsi que j’ai construit un petit peu le rĂ©cit autour de cela. Parfois, on voit un fantĂŽme de l’image prĂ©cĂ©dente — si on plisse les yeux, on voit l’image qui existait auparavant. Travailler sur cette idĂ©e du fantĂŽme de l’image cachĂ©e, ça m’intĂ©resse Ă©normĂ©ment. Pour moi, dans beaucoup d’images, dans beaucoup de choses que je peux lire, il y a des choses cachĂ©es. Chacun, en lisant une bande dessinĂ©e, par exemple, va se construire une sorte d’imaginaire mental, qui sera le sien propre, mais qui sera aussi une sorte d’imaginaire collectif — tout dĂ©pend de ce que l’on perçoit dans l’image. En ce moment, je travaille pour une revue d’art, qui s’appelle Art Magazine, et tous les mois je fais une planche de neuf cases, et je prends une bande dessinĂ©e — que ce soit Jo, Zette et Jocko, ou le premier Lefranc, ou des choses comme cela, et j’isole, je redessine des petits dĂ©tails de cette bande dessinĂ©e-lĂ , de un centimĂštre Ă  deux centimĂštres maximum, et ce sont ces petits dĂ©tails-lĂ  qui me font penser Ă  une Ɠuvre d’art contemporain, ou plus ancienne, existante. C’est-Ă -dire que quand je lis cette bande dessinĂ©e-lĂ , je me dis tiens, ça me fait penser Ă  un Morellet», ou ça me fait penser Ă  un Buren». Alors c’est un peu forcĂ©, Ă©videmment Jacques Martin, pour son truc, il n’a pas pensĂ© Ă  Morellet, surtout si l’Ɠuvre de Morellet date d’aprĂšs la bande dessinĂ©e en question. Mais c’est plus pour parler de la maniĂšre dont on peut rĂ©agir, mentalement, faire des liens entre chaque image. Xavier Guilbert Sur les aspects de recouvrement, tu abordes ça comment ? Le processus, c’est de l’improvisation, c’est quelque chose que tu prĂ©pares, en choisissant ce que tu vas dĂ©voiler ? Jochen Gerner Chaque chose, chaque projet se construit en fonction du support, et je ne sais jamais trop Ă  l’avance comment ça va se faire. C’est pour ça qu’il n’y a pas vraiment de constance graphique dans mon travail, puisque chaque chose se construit un petit peu en fonction du support, en fonction de la technique, d’encre, de peinture qui va tenir sur le papier et qui va permettre de laisser plus ou moins de transparence en fonction du projet. On revient au titre de l’exposition GĂ©ologie de l’imprimé». C’est comme si j’étais un gĂ©ologue et que je faisais un forage, et que j’allais changer de machine pour le carottage en fonction de la duretĂ© de la pierre. C’est un petit peu ça, en fait. Du coup, je m’adapte en fonction — donc il y a des recouvrements, il y a des semi-recouvrements, il y a des choses qui sont plus une sorte de dĂ©tournement par le biais du dessin, comme ce que je fais pour la revue d’art ou ce que j’ai fait avec Contre la bande dessinĂ©e. LĂ , je pars d’une matiĂšre textuelle, et je fais une sorte d’illustration de cette matiĂšre textuelle qui n’est pas de moi, mais qui est une sorte d’accumulation de citations. A chaque fois, il y a un autre type de rĂ©cit, de construction de la page, de format, qui se dĂ©cide en fonction vraiment du sujet. Ce ne sont jamais les mĂȘmes formes, les mĂȘmes textures de papier, j’essaye que chaque livre se façonne en fonction du projet que j’essaye de faire. Xavier Guilbert C’est intĂ©ressant ce que tu dis, parce qu’au dĂ©part, j’avais l’impression qu’il s’agissait vraiment de deux directions distinctes. D’une part, ces accumulations, ces inventaires, et de l’autre, les dĂ©tournements. Alors que pour toi, ce sont des choses qui sont du mĂȘme ordre ? Jochen Gerner Oui, tout participe d’une mĂȘme sorte de rĂ©flexion en fait. MĂȘme la bande dessinĂ©e sur le temps, qui Ă©tait une commande du Centre Pompidou pour une exposition sur le temps, pour le catalogue, cette sorte de rĂ©flexion mentale oĂč je redessine toutes les thĂ©matiques autour du temps, mais c’est aussi un travail d’accumulation, de rĂ©interprĂ©tation graphique d’une matiĂšre existante. Mais lĂ , il n’y a pas du tout d’idĂ©e de recouvrement. Je m’impose souvent des contraintes, comme pour ces projets de dessins faits dans le train, pour un livre qui s’appelle Grande Vitesse. A chaque fois que je prenais le train, j’avais un carnet, et je me mettais Ă  dessiner toutes les choses que je voyais passer par la fenĂȘtre. Et du coup, cela enclenche un certain type de dessin que l’on ne pourrait pas avoir autrement. Cela correspondait aussi Ă  la pĂ©riode oĂč je voyageais beaucoup, entre Nancy et Paris, avant l’arrivĂ©e du TGV, et aprĂšs l’arrivĂ©e du TGV le parcours n’est pas le mĂȘme, la vitesse n’est pas la mĂȘme, et ce que je vois n’est pas la mĂȘme chose. C’est la mĂȘme idĂ©e avec les dessins que je fais au tĂ©lĂ©phone. Les dessins au tĂ©lĂ©phone, beaucoup de monde en fait, mĂȘme ceux qui ne dessinent jamais, ce qui est intĂ©ressant, mais ce que je fais en Ă©tant au tĂ©lĂ©phone, l’esprit qui est ailleurs et la main qui dessine, cela dĂ©veloppe un type de dessin que je n’ai pas du tout par ailleurs. AprĂšs, cela me donne une sorte de matiĂšre graphique nouvelle, qui va peut-ĂȘtre me servir pour aprĂšs, faire du dessin de presse ou un type d’écriture. C’est tellement libĂ©rĂ© de toute rĂ©flexion, puisque ça part et je dĂ©couvre le dessin aprĂšs, c’est assez intĂ©ressant de faire cette expĂ©rience-lĂ . Xavier Guilbert C’est une maniĂšre de gĂ©nĂ©rer une matiĂšre que tu rĂ©utilises ensuite. Je crois que c’est dans Lignes ou Branchages, on commence par un listing de tous les types de sonneries de tĂ©lĂ©phone qui existent, puis il y a les pages du livre et Ă  la fin, on trouve un inventaire de tout ce qui a Ă©tĂ© reprĂ©sentĂ© dans ces pages. Il y a Ă  nouveau une mise en scĂšne d’un inventaire d’inventaire d’inventaire
 Jochen Gerner Oui, j’ai exagĂ©rĂ© un peu l’idĂ©e de catalogue de formes, de formes mentales qui Ă©taient prĂ©sentes dans ma tĂȘte. J’essaie de faire une sorte de listing, j’essaie de comprendre pourquoi j’avais fait toute une page avec un nombre incalculable de vĂ©los, et pourquoi la page d’aprĂšs il y a des racines, ou — ce sont des choses que je ne contrĂŽle pas. Et aprĂšs il y avait cette idĂ©e de faire un petit dictionnaire imagĂ© avec l’énumĂ©ration. Xavier Guilbert Ce qui est intĂ©ressant, c’est qu’au-delĂ  du principe ludique, il y a une sorte de discours implicite qui en ressort, qui est souvent trĂšs critique. C’est notamment trĂšs prĂ©sent dans Contre la bande dessinĂ©e, oĂč il y a une approche Ă  charge contre un certain discours. Il y a l’accumulation, il y a l’effet d’inventaire, mais derriĂšre, tu touches aussi Ă  l’essence de ce que cela reprĂ©sente. Le fait de mettre cĂŽte Ă  cĂŽte toutes ces variations finit par les annuler — je pense Ă  la planche du Saint Patron, avec tous les Saint Nicolas dans leur version locale, mais ce qui en ressort, c’est l’essence de Saint Nicolas. Jochen Gerner Je veux avoir le discours le plus simple, mais sans moi-mĂȘme faire une sorte de discours. Je ne suis pas du tout dans la thĂ©orie et dans l’analyse Ă©crite, je veux faire cette analyse par le biais du dessin uniquement. C’est pour cela que Contre la bande dessinĂ©e, c’était une sorte de collecte de phrases entendues Ă  la radio, lues dans des magazines ou dans des romans, sur la bande dessinĂ©e, mais qui donc, globalement, citaient la bande dessinĂ©e comme quelque chose de pĂ©joratif. Quand on dit que telle piĂšce de théùtre, c’est de la bande dessinĂ©e, c’est rarement pour dire que la piĂšce de théùtre est intĂ©ressante. Et donc, je citais toutes ces phrases, et en les mettant les unes Ă  cĂŽtĂ© des autres dans un certain ordre, et en rĂ©pondant Ă  ces phrases uniquement par le biais du dessin, en faisant un dessin qui essayait d’illustrer ce qui Ă©tait dit dans cette phrase-lĂ , je rĂ©pondais finalement Ă  l’attaque, Ă  la critique, Ă  l’ironie, avec une nouvelle ironie qui Ă©tait celle du dessin. C’est par le biais de la bande dessinĂ©e que j’essayais de rĂ©pondre Ă  cette attaque, mais sans moi-mĂȘme tenir un discours. J’essaye, en mettant des images les unes Ă  cĂŽtĂ© des autres, de tenir un discours. Xavier Guilbert Il n’y a pas que cela. De mĂ©moire, tu fais un inventaire de toutes les onomatopĂ©es de moteurs dans un Michel Vaillant, tu fais aussi un listing de tous les cadres dans un Tintin
 Jochen Gerner Oui, il y a Ă  la fois une sorte d’hommage Ă  la bande dessinĂ©e, mais je ne m’empĂȘche pas d’ĂȘtre critique envers certains tics de la bande dessinĂ©e. Ça m’intĂ©resse de ne pas faire un truc tout blanc, tout noir, en disant je viens dĂ©fendre la bande dessinĂ©e». Je me permets aussi de critiquer», de me moquer un petit peu de certains dessinateurs, du discours de certains dessinateurs sur la maniĂšre de faire de la bande dessinĂ©e, qu’il faut construire un personnage comme ça, que l’on assure nos planches Ă  tel prix
 Et lĂ , justement, je me suis amusĂ© Ă  redessiner les formes de certaines flammes — comment chaque dessinateur dessine une flamme de bande dessinĂ©e, ça peut ĂȘtre intĂ©ressant pour faire un comparatif graphique entre diffĂ©rents dessinateurs. Xavier Guilbert Les phylactĂšres, aussi. Jochen Gerner Oui, mais pour les flammes de bande dessinĂ©e, je suis parti d’un petit fait divers oĂč pour une exposition, il y avait toutes les planches exposĂ©es qui avaient brĂ»lĂ©, et l’on avait parlĂ© de la valeur d’assurance de ces planches. Du coup, j’ai dessinĂ© toutes les flammes en mettant Ă  chaque fois la valeur d’assurance de la flamme de Bilal, de la flamme d’Uderzo ou de Zep. C’est intĂ©ressant d’aborder aussi cette thĂ©matique-lĂ  de la bande dessinĂ©e
 Xavier Guilbert Tu parlais du choix du titre d’Abstraction, est-ce que pour Contre la bande dessinĂ©e tu as eu le mĂȘme genre de rĂ©flexion ? Jochen Gerner Oui, contre la bande dessinĂ©e», cela veut dire une sorte d’opposition Ă  la bande dessinĂ©e, mais en mĂȘme temps cela peut dire tout contre la bande dessinĂ©e». C’est-Ă -dire ĂȘtre au sein de la bande dessinĂ©e, et essayer de comprendre comment ça marche. Et puis il y avait aussi le sous-titre, choses lues et entendues» qui, pour moi, permettait un petit peu de comprendre la logique du titre. C’est vrai que je ne donne pas toujours tous les indices, et que je ne mets pas forcĂ©ment une prĂ©face. Il y a une postface dans Abstraction», mais je ne donne pas forcĂ©ment toutes les clĂ©s du travail, avec un mode d’emploi pour permettre de comprendre comment s’est fait le livre. Ce n’est pas forcĂ©ment nĂ©cessaire. Xavier Guilbert Tous ces procĂ©dĂ©s d’accumulation, de collecte d’information, sont des procĂ©dĂ©s qui, j’imagine, prennent du temps. C’est quelque chose qui part d’une intuition, ou est-ce qu’un jour tu te dis que tu vas faire un livre sur le discours entourant la bande dessinĂ©e, et brusquement tu sors ton paquet de post-its et tu te mets Ă  ouvrir les oreilles ? Jochen Gerner sourit Dans mon atelier, il y a le bureau, et puis il y a le mur en face de moi, et il n’y a que des petits bouts de papier, avec de l’écriture, il n’y a aucune d’image. Et ce ne sont que des choses que j’ai envie de faire, aussi bien dans le domaine de l’exposition
 C’est comme des post-its, sauf que ce sont des papiers de natures diverses, et des idĂ©es de projets. Dans tout ce qui y est prĂ©sent, il y en a peut-ĂȘtre 10 % que j’ai pu faire, et aprĂšs, c’est avec le temps, finalement ceux que je ne retiens pas, c’était peut-ĂȘtre parce que ce n’était pas le plus important ou pas le plus judicieux Ă  faire. Par exemple, je travaille depuis que Contre la bande dessinĂ©e est sorti — je crois, en 2008 — et depuis j’ai continuĂ© Ă  recueillir des phrases. Il y a un autre projet, donc j’ai un classeur comme ça de choses rĂ©coltĂ©es, car ce sont des choses qu’il faut rĂ©colter avec le temps. Et quand je serai prĂȘt, je commencerai Ă  faire un autre projet dans cet esprit-lĂ , mais sous un autre angle. J’aimerais bien faire une sorte de — lĂ , il y a des chapitres, littĂ©rature, musique, architecture ; et le prochain ce sera plutĂŽt pharmacie, menuiserie — des thĂšmes qui n’ont rien Ă  voir avec la bande dessinĂ©e. Il y a politique, aussi. J’ai dĂ©couvert que tous les hommes politiques emploient souvent la phrase extraite de HergĂ©, le sparadrap du Capitaine Haddock». Je crois que les rĂ©fĂ©rences des hommes politiques, c’est HergĂ©, Iznogoud et Lucky Luke. Et c’est tout. rires de la salle Mais ça revient tellement souvent, et c’est tellement toujours Iznogoud, Rantanplan et le sparadrap du Capitaine Haddock que je vais faire quinze pages sur le sparadrap du Capitaine Haddock, avec Ă  chaque fois, une citation d’un homme politique. Xavier Guilbert En parlant de politique, tu m’offres une superbe transition. Puisque tu as un strip — je ne sais pas exactement avec quelle frĂ©quence
 Jochen Gerner C’est un strip tous les jours dans LibĂ©ration, tous les jours de la semaine. Pas le week-end. Xavier Guilbert C’est Yan Lindingre qui scĂ©narise
 Jochen Gerner Oui, c’est Yan Lindingre, scĂ©nariste-auteur de bande dessinĂ©e qui habite aussi en Lorraine. J’étais enseignant en mĂȘme temps que lui dans une Ă©cole d’art, l’école des Beaux-Arts de Metz. Je l’ai un peu rencontrĂ© Ă  ce moment-lĂ , et je lui ai dit, il y a un an et demi, s’il Ă©tait possible de me prĂ©voir un petit projet d’histoire, de rĂ©agir par rapport Ă  ce qui se passait en politique. Et voilĂ , on fait ça — on a Ă©tĂ© un peu prĂ©venus au dernier moment par Alain Blaise[2]. On avait prĂ©vu tout une sorte de stratĂ©gie qui Ă©tait plutĂŽt tout une sorte de rĂ©flexion sur la maniĂšre de penser une affiche. Comment la campagne, par exemple, on la prĂ©pare, et comment on pense Ă  une affiche. Et quand Alain nous a dit feu vert, banco !», l’affiche de Sarkozy Ă©tait dĂ©jĂ  sortie. On avait un petit peu prĂ©parĂ© les scĂ©narios, et du coup il a fallu repenser plutĂŽt l’idĂ©e comme une sorte de cellule de campagne qui rĂ©flĂ©chit sur qu’est-ce qu’il faut dire maintenant, comment on rĂ©flĂ©chit. LĂ , on en a quelques-uns en avance, on rĂ©flĂ©chit et on s’intĂ©resse un petit peu Ă  ce qui se dit, mais il y a tellement de matiĂšre, tellement de richesse, c’est tellement violent, tellement
 en fait, on ne peut pas ĂȘtre Ă  leur niveau, c’est impossible. Un jour, Yan m’envoit quelque chose voilĂ , par rapport Ă  ce qui s’est passĂ© Ă  Toulouse, on va faire un strip oĂč quelqu’un de la cellule de campagne de Sarkozy, sous-entendu, donc cette personne dit on a rĂ©solu cette affaire-lĂ , sans utiliser la police de proximitĂ© et sans remplacer un fonctionnaire sur deux.» Je fais mon strip dans la journĂ©e ; le soir, je regarde Internet, et ValĂ©rie Rosso-Debord, de Nancy, dit exactement ça. Sauf que pour elle ce n’était pas un gag, pour elle c’était sĂ©rieux. Mais notre strip tombait un peu Ă  plat
 rires de la salle 
 c’était comme si c’était elle qui nous avait donnĂ© l’idĂ©e. Pareil, il avait prĂ©vu un strip, quand Ă©tait sortie l’affiche La France Forte», avec le Concordia. Et en fait, le temps que je dessine le truc, il y avait mille affiches, de fausses affiches, qui Ă©taient sorties. Du coup, il n’est mĂȘme pas paru, ce strip. Mais il y a tellement de choses que l’on pourrait faire dix strips par jour, avec tout ce qui est dit. C’est intĂ©ressant, je considĂšre ça comme une matiĂšre premiĂšre aussi, et puis c’est intĂ©ressant de travailler avec quelqu’un d’autre, avec cette contrainte-lĂ . Et surtout la contrainte aussi d’avoir des personnages qui sont des personnages semi-fictifs — enfin, je vois Ă  peu prĂšs qui est le personnage principal, qui n’est pas forcĂ©ment connu du grand public, mais qui fait partie de la cellule de campagne, et on dit notre candidat», mais sans jamais citer de nom. Xavier Guilbert Tu reviens ici sur quelque chose de beaucoup plus classique au niveau formel. Il y a des cases, il y a des personnages, il y a des bulles. Alors que comme tu dis, il y a Ă©normĂ©ment de choses accumulĂ©es. Tu pourrais faire quelque chose de plus proche de
 Jochen Gerner L’intĂ©rĂȘt, c’est aussi de temps en temps, de rester dans une sorte de registre comme ça, et de
 J’en reviens Ă  ce que disait David B. tout-Ă -l’heure c’est-Ă -dire que les rapports entre image et Ă©crit, c’est tellement riche, il y a tellement de choses Ă  faire et Ă  dĂ©couvrir, pour moi c’est une potentialitĂ© Ă©norme. C’est pour cela que je ne voudrais pas me limiter Ă  la simple structure case-bulle-rĂ©cit d’un certain nombre de pages. Je pense qu’il y a Ă  inventer des choses au niveau du format. Mon projet, ce serait d’arriver de faire un album normal — pas dans la normalitĂ© de Hollande rire mais un album qui serait normal en apparence, en couleur, avec des cases, avec des bulles, mais de maniĂšre cachĂ©e, d’avoir quelque chose de complĂštement trouble. Et donc je suis en train de travailler sur une sorte de projet comme ça, et essayer de faire croire que j’ai fait un livre normal». Je suis en train d’y rĂ©flĂ©chir. Xavier Guilbert Tu parlais de travailler avec quelqu’un — il y a un scĂ©nariste, et tu es le dessinateur — mais vous fonctionnez comment ? Est-ce que cela rejoint aussi ton choix de ne pas faire de la fiction, puisque ici, on est dans une sorte de bande dessinĂ©e du rĂ©el, pour Ă©voquer l’un des thĂšmes mis Ă  l’honneur par ce Festival
 Jochen Gerner Je m’intĂ©resse tout autant que lui Ă  ce qui se passe, donc parfois je lui envoie de petites thĂ©matiques. Je lui dis tiens, j’ai vu ça, la mĂ©prisance, des choses comme ça, j’aimerais que tu rĂ©agisses lĂ -dessus». Et il me dit oui, j’ai dĂ©jĂ  tout notĂ©, je prĂ©pare des strips». Et donc, il en a Ă©normĂ©ment comme ça, on discute dessus, et il en a une vingtaine d’avance. Comme c’est trĂšs riche, du coup, quand je lui dis que je vais travailler sur ce scĂ©nario-lĂ , il est forcĂ©ment obligĂ© de le rĂ©adapter par rapport Ă  ce qui s’est dit depuis le moment oĂč il a Ă©crit ce scĂ©nario. Parce que Sarkozy a sorti de nouvelles insultes
 voilĂ , il a fait un truc sur les tics des insultes de Sarkozy, et puis il en dit trois, quatre, cinq depuis, et on a dĂ» les rajouter Ă  la liste. Il faut toujours rĂ©actualiser. Mais j’aime bien ça aussi, de faire des Ă©changes avec quelqu’un, et puis d’essayer d’aller dans une direction Ă  laquelle je ne suis pas forcĂ©ment habituĂ©. Par exemple, dans le dessin de presse, je ne fais jamais de dessin politique, ce n’est pas trop mon domaine. Mais j’aime bien, tout d’un coup, me dire que je fais une sorte de rĂ©flexion politique, mais sans jamais dessiner d’homme politique. Avoir cette contrainte-lĂ  de parler de ça, mais de maniĂšre diffĂ©rente. Et puis avec des personnages trĂšs stylisĂ©s, c’est trĂšs minimal, avec toujours un peu la mĂȘme configuration de piĂšce, la mĂȘme disposition
 Xavier Guilbert Tu parlais d’amener cela vers le livre. Or, comme une partie de ton travail est en premier lieu destinĂ© Ă  ĂȘtre exposĂ©, comment est-ce que tu abordes la transition vers le livre ? Je pense en particulier au Panorama du Feu, qui a donnĂ© lieu non pas Ă  un livre, mais Ă  un objet assez inhabituel. Jochen Gerner En fait, je fais parfois des livres qui ne donnent pas du tout lieu Ă  des expositions. Enfin si, cela peut ĂȘtre exposĂ©, mais dans des expositions plus de bande dessinĂ©e. Par rapport Ă  moi, j’alterne un petit peu dans l’annĂ©e les projets d’exposition et les projets d’édition, mais tout ne fait pas forcĂ©ment
 par exemple, ce que j’ai fait sur le catalogue IKEA n’a pas dĂ©bouchĂ© sur un projet d’édition. Par contre, il y a vraiment des projets dont je sais Ă  l’avance que ce sera tout aussi intĂ©ressant de rĂ©flĂ©chir Ă  la l’idĂ©e de l’exposition, Ă  la maniĂšre dont ce sera prĂ©sentĂ© dans un certain cadre, et puis Ă  la maniĂšre dont cela va se construire sous forme d’un objet Ă©ditorial. Et quand c’est tout aussi intĂ©ressant de l’exposer et de faire un projet Ă©ditorial avec, j’essaie de le faire. AprĂšs, ce n’est pas toujours possible pour des questions de coĂ»t, de prioritĂ© ou d’intĂ©rĂȘt rĂ©el de montrer des choses. Avec l’Association, ce sont souvent des petits tirages, je ne suis pas celui qui va plomber — enfin, je n’espĂšre pas — qui va plomber l’Association. rire Je n’exige pas non plus des tirages importants, et si on me dit que ce n’est pas intĂ©ressant de faire un livre avec ça, je ne me vexe pas du tout et je le reconnais. Et je les remercie de ne pas avoir mis ça dans les prioritĂ©s. Xavier Guilbert Je parlais du Panorama du Feu, parce que c’est un coffret qui contient une cinquantaine de petits fascicules de quoi, quatre feuilles ? Jochen Gerner Il y a six pages en tout, avec la couverture. Donc je reprends — il y a les couvertures qui sont dĂ©tournĂ©es, donc je reprends tout un systĂšme de code graphique avec des flammes, ce sont toujours des petites bandes dessinĂ©es de guerre. J’ai travaillĂ© sur cette idĂ©e-lĂ  de rĂ©currence et de violence et de feu sur ces couvertures-lĂ . Et Ă  l’intĂ©rieur, c’était plus une logique OuBaPienne je n’ai pas du tout dessinĂ©, je reprenais des cases qui Ă©taient prĂ©sentent dans ces bandes dessinĂ©es en essayant de construire un nouveau rĂ©cit. Et lĂ  aussi c’était une sorte de rĂ©flexion sur quelles Ă©taient les rĂ©currences, les explosions qui revenaient en permanence, les types de visages. Dans ce cas, c’est intĂ©ressant, parce que l’on dĂ©couvre des choses qui reviennent dans une bande dessinĂ©e et qui ont Ă©tĂ© fait au calque. Par exemple, il y a un avion qui revient toujours dans la mĂȘme position, et on voit qu’il a fait ça Ă  la table lumineuse Ă  chaque fois le dĂ©cor change, mais le dessinateur ne s’est pas embĂȘtĂ©. C’est Ă  la fois une sorte de rĂ©flexion un peu humoristique sur ces aspects, et puis parfois j’ai dĂ©couvert des auteurs de bande dessinĂ©e dont j’ai adorĂ© le dessin et que je ne connaissais pas avant. Par exemple, il y en a un qui s’appelle MĂ©liĂšs, et je ne le connaissais pas du tout. Et deux semaines aprĂšs l’avoir dĂ©couvert, je vais voir mon libraire Ă  Nancy, et il me dit tiens, il y a quelqu’un qui m’a vendu des originaux de cet auteur-là». Il vendait 10€ les planches, et c’était magnifique. Donc j’en ai acheté  rire C’était vraiment une dĂ©couverte de beautĂ©. Il y avait tout aussi bien des choses tout-Ă -fait maladroites que des choses trĂšs classiques, que je n’apprĂ©ciais pas forcĂ©ment graphiquement. Mais je vois toujours de l’intĂ©rĂȘt Ă  se pencher sur ça, d’ĂȘtre comme un gĂ©ologue ou un spĂ©lĂ©ologue, et de fouiller dans toute cette matiĂšre-lĂ . Xavier Guilbert Une chose qui m’intĂ©resse dans l’évolution entre TNT en AmĂ©rique, et les choses qui sont exposĂ©es lĂ -haut comme les Martine, c’est le fait que tu laisses plus transparaĂźtre ce qu’il y a dessous. Jochen Gerner Mais est-ce qu’on aurait reconnu que c’était Martine si je ne l’avais pas dit ? Parfois, c’est le titre de la sĂ©rie qui donne la clĂ© du travail. Mais je ne pense pas que les enfants qui visitent l’exposition, ou les petites filles qui lisent Martine chez elles, est-ce qu’elles auraient reconnu Martine, je ne suis pas forcĂ©ment sĂ»r. Xavier Guilbert Oui, mais quand tu parles des petits formats, comme celui Ă  la base d’Asbtraction ou pour Bukaland, on ne connait pas non plus. Il y a une rĂ©fĂ©rence Ă  un certain univers, mais pas Ă  l’Ɠuvre particuliĂšre. Jochen Gerner Non non, parfois la rĂ©fĂ©rence peut se faire par rapport Ă  une forme de bande dessinĂ©e qui se faisait Ă  une Ă©poque donnĂ©e. Par rapport Ă  Martine, peu importe de savoir quel titre j’ai dĂ©tournĂ©, c’est plutĂŽt par rapport Ă  un type de dessin, Ă  un type d’édition, plutĂŽt que le rĂ©cit en particulier. Je m’intĂ©resse aussi Ă  la matiĂšre imprimĂ©e, Ă  la trame, donc ça apparaĂźt dans le livre. Ça, ce sont les cheveux, on ne voit pas forcĂ©ment que ce sont des cheveux, parce que je prends la matiĂšre comme une sorte de matiĂšre graphique abstraite. Et donc ce sera aussi bien les rochers, qu’un bout de ciel, un bout d’herbe, un bout de cheveux. J’essaie que cela devienne quelque chose de complĂštement diffĂ©rent. Panorama du Feu, on voit trĂšs bien que je m’intĂ©resse Ă  la matiĂšre feu», Ă  la matiĂšre explosion», et on arrive Ă  le comprendre. Il y a aussi une autre sĂ©rie, justement, je pense Ă  Bukaland, oĂč lĂ  je dĂ©tourne et je redessine un petit peu, et on voit plus, effectivement, de choses qui sont prĂ©sentes dans la bande dessinĂ©e originale. Mais dans ce qui est exposĂ©, en fait, il y a encore le texte de la bande dessinĂ©e d’origine. Au dĂ©part, c’était une sĂ©rie de planches pour Lapin, dans laquelle j’avais enlevĂ© tout le texte dans les bulles, et j’avais demandĂ© Ă  Anne Baraou, qui fait aussi partie de l’OuBaPo et qui est scĂ©nariste, sans qu’elle ait lu l’histoire de dĂ©part, d’inventer un nouveau rĂ©cit. C’est une sorte de procĂ©dĂ© assez courant dans l’OuBaPo, on fonctionne un petit peu en semi-aveugle, et donc elle m’a réécrit tout un rĂ©cit, trĂšs trĂšs drĂŽle, qui est paru dans Lapin[3]. Donc, il n’y a pas forcĂ©ment — ces planches-lĂ  n’étaient pas pensĂ©es au dĂ©part pour un projet d’exposition, c’était vraiment pensĂ© pour Lapin. Ici, elles sont montrĂ©es comme ça, comme une sorte de tĂ©moignage de choses que j’ai pu faire, mais il n’y a pas forcĂ©ment toutes les clĂ©s. Xavier Guilbert Ca correspond Ă  un plaisir de plasticien, le fait de recouvrir ? Il y a cette aspect de laisser sa marque, sur quelque chose d’aussi symboliquement chargĂ© que Tintin
 Jochen Gerner J’aime bien aller vers le risque. DĂšs qu’on me dit que c’est dangereux et qu’il ne faut surtout pas faire ça, j’y vais quand mĂȘme. C’est plus essayer de m’attaquer Ă  quelque chose de sacrĂ©, quelque chose qu’il ne faut pas faire. L’idĂ©e de dessiner sur des — en plus, pour Tintin, j’ai dĂ» acheter des Ă©ditions anciennes, parce que sur les Ă©ditions actuelles, l’encre ne tient pas, c’est une sorte de papier glacĂ©. Donc j’ai achetĂ© des Ă©ditions assez cher rire, chez un libraire spĂ©cialisĂ© Ă  Paris, et puis je les ai dĂ©coupĂ©e avec mon cutter, et
 Xavier Guilbert C’est cet Ă©lĂ©ment-lĂ  qui est trĂšs fort. C’est que le support — tu disais pour Abstraction, le point de dĂ©part est que tu tombes sur deux exemplaires de
 Jochen Gerner Oui, j’avais achetĂ© par hasard deux exemplaires, sans le faire exprĂšs, deux fois le mĂȘme. Et en fait, pour travailler effectivement sur ces planches, je suis obligĂ© d’avoir deux exemplaires, et en fait, puisque le recto et le verso, je ne peux pas le faire sur la mĂȘme page. DĂ©jĂ , en travaillant juste un recto, la page commence sĂ©rieusement Ă  gondoler, je n’ai pas du tout droit Ă  l’erreur. Si tout d’un coup je fais une grosse tache d’encre — bon, ça ne se verra pas forcĂ©ment sur l’édition, mais pour le projet exposĂ©, oui, ça se verra. C’est une sorte de travail d’équilibriste, tout le temps. AprĂšs, en ce moment je fais pas mal de recouvrements, mais je ne pense pas faire ça toute ma vie non plus. J’aime bien, Ă  moment donnĂ©, changer totalement — comme quand j’ai fait Courts-Circuits GĂ©ographiques ou Un temps., qui Ă©taient un type d’écriture donnĂ©e, sans crayonnĂ©, des toutes petites cases avec du texte en-dessous, une sorte de rĂ©fĂ©rence aux premiĂšres bandes dessinĂ©es. C’était aussi une volontĂ© pour moi de me libĂ©rer d’une certaine forme d’écriture avec un crayonnĂ© au prĂ©alable, pour essayer de dĂ©structurer un petit peu mon travail. Moi aussi j’interviens sur mon dessin en essayant de le casser. A moment donnĂ©, quand j’ai trop explorĂ© une direction, j’essaie d’aller dans une autre. LĂ , je me suis achetĂ© une dĂ©chiqueteuse, et je
 dĂ©chiquette mes dessins rires de la salle. Je ne m’attaque pas seulement aux autres, je fais ça aussi avec mon travail. J’ai contactĂ© un empailleur, et il m’a dit qu’il faut deux kilos de papier, donc de mes dessins, pour empailler une poule. Donc j’attends la poule rires de la salle. Pour moi, c’étaient des dessins qui n’avaient plus du tout — comme c’étaient des commandes de dessins, ils ne marchaient plus du tout. C’est-Ă -dire, comme ils Ă©taient liĂ©s Ă  un contexte de commande de dessin Ă©conomique, ils n’avaient plus du tout de force pour moi. Ils Ă©taient en couleur, donc du coup cela fait des confettis en couleur, c’est assez beau, et donc j’attends de recevoir ma poule noire. Peut-ĂȘtre que je ferai un petit zoo aprĂšs
 Disons que la sacralisation n’est pas — je ne sacralise pas mon travail non plus. J’aime bien me remettre en question, et aller dans une autre direction. Le plus important, c’est quand mĂȘme, Ă  la fois l’image que l’on peut avoir d’une exposition, mais en mĂȘme temps le livre lui-mĂȘme. Plus que le dessin original. Xavier Guilbert Et donc, au-delĂ  de cette poule, quels sont les directions que tu explores actuellement ? Des projets qui seraient un peu plus faciles Ă  ranger dans une bibliothĂšque ? rires Jochen Gerner Je travaille sur un autre projet, toujours pour l’Association, un autre Contre la bande dessinĂ©e dont j’ai parlĂ© tout-Ă -l’heure. Je ne sais pas quand je vais le commencer. Et puis il y a aussi ce projet, vaguement, de dĂ©tourner Blake et Mortimer, mais sans forcĂ©ment dessiner Blake et Mortimer. J’aimerais que ça ressemble, dans la forme, vraiment, Ă  un album de Blake et Mortimer. Par le trait, avec cette idĂ©e de dessin qui part de la ligne claire, qui est trĂšs travaillĂ©, ça m’intĂ©resse de travailler sur ça, et j’aimerais commencer Ă  travailler sur ça assez rapidement. Et puis j’ai un autre projet, pour en finir avec HergĂ©, de travailler sur la couleur de tous les albums de HergĂ©. Donc de faire un nuancier, un nuancier Pantone de toutes les couleurs de HergĂ©. Xavier Guilbert On revient Ă  Tintin. Je me souviens d’un article dans l’une des Éprouvettes oĂč tu parlais du travail que tu avais fait avec des Ă©lĂšves sur les couvertures d’albums. Jochen Gerner C’était un travail sur L’Oreille CassĂ©e. Parfois, je fais des workshops — enfin, des ateliers dans des Ă©coles d’art. Et lĂ , j’avais demandĂ© aux Ă©tudiants de travailler sur L’Oreille CassĂ©e, le truc Ă©tait de ne jamais redessiner, de ne jamais montrer le trait de HergĂ©, mais de saisir, de s’emparer d’un petit concept prĂ©sent dans L’Oreille CassĂ©e, et de le dupliquer sous forme de livret. Et le livret avait une sorte d’homothĂ©tie de taille par rapport Ă  l’album d’origine, beaucoup plus petite. A l’intĂ©rieur, c’étaient des dessins en noir et blanc, et ils faisaient la petite histoire qu’ils voulaient Ă  partir de ça. Il y en a un qui s’est intĂ©ressĂ© aux coiffures dans L’Oreille CassĂ©e, un autre Ă  la course-poursuite qu’il y a dans la montagne, etc. Ils devaient trouver un titre, et la couleur de la couverture du livret, c’était encore quelque chose qu’ils ont pris avec une pipette dans l’album de dĂ©part. Comme chacun choisissait sa couleur, cela donnait tout le nuancier de couleurs de L’Oreille CassĂ©e. Et ça, je crois que ç’a Ă©tĂ© bien apprĂ©ciĂ©. Il y a eu un projet Ă  un moment donnĂ© que dans l’une des salles temporaires du MusĂ©e HergĂ©, ça soit Ă©ventuellement exposĂ©. Parfois, si on est un peu dans une sorte de registre plasticien, art contemporain, ça peut Ă©ventuellement intĂ©resser la Fondation Moulinsart. Mais je pense qu’il ne faut pas trop les embĂȘter. rires de la salle Xavier Guilbert A propos, TNT a Ă©tĂ© reçu comment ? En dehors du fait d’avoir Ă©tĂ© obligĂ© de réécrire les textes
 Jochen Gerner Je n’ai eu aucun Ă©cho. J’ai juste eu Ă  un moment-donnĂ© un journaliste des Inrockuptibles qui voulait faire un article sur Tintin en AmĂ©rique qui m’a dit oh, j’ai appelĂ© la Fondation Moulinsart pour leur demander ce qu’ils en pensaient», et il m’a dit j’ai senti, quand je leur ai appris» — parce que c’est lui qui leur a appris — tout d’un coup, il y avait des sirĂšnes qui commençaient Ă  — alerte !» rires Et tous les agents se sont mis Ă  se renseigner sur le truc. Mais non, je n’ai pas eu du tout de retour. Donc sous-entendu, ça a Ă©tĂ© apparemment apprĂ©ciĂ©. J’avais rencontrĂ© Joos Swarte, qui a travaillĂ© sur toute l’identitĂ© visuelle du musĂ©e, je l’avais rencontrĂ© Ă  Bastia justement, et il m’a dit que c’était super bien et que ça leur plairait. Je pense que c’est bien, je l’ai fait une fois, mais il ne faut pas trop que je les embĂȘte une deuxiĂšme fois. rires de la salle Non, mais parce qu’en plus il y avait des articles sur ce livre-lĂ , mais ce n’était pas un livre contre Tintin ni pour Tintin, c’était un livre sur Tintin. Xavier Guilbert Sur Tintin, dans beaucoup de sens. Jochen Gerner Dans les deux sens, mais pour dire qu’il y avait encore Ă©normĂ©ment de chose Ă  dĂ©couvrir dans la matiĂšre image et texte de Tintin. Donc ça, a priori, ça les intĂ©ressait. Tout cet angle-lĂ , ça les intĂ©ressait. Xavier Guilbert En ce qui me concerne, j’ai vu les planches de TNT exposĂ©es dans le cadre de l’exposition Vraoum Ă  la Maison Rouge il y a trois-quatre ans, et ce qui Ă©tait intĂ©ressant, c’est que parmi tous les artistes contemporains, tu Ă©tais l’un des rares Ă  prendre la bande dessinĂ©e pour en faire de la bande dessinĂ©e, et non pas Ă  lui emprunter seulement des codes ou des personnages. Jochen Gerner C’est peut-ĂȘtre le fait que je vienne justement du monde de l’édition. Pour moi, c’est une sorte de circuit de que je connais, et que je ne vais prendre vu de l’extĂ©rieur. J’arrive un peu dans le milieu de l’art contemporain, mais en ne me dĂ©tachant pas de l’endroit d’oĂč je viens. D’ailleurs, je ne vais pas Ă  un endroit pour me sĂ©parer d’un autre endroit, je reste toujours avec tous mes bagages. L’avantage que l’on peut avoir en tant qu’auteur de bande dessinĂ©e, Ă  ĂȘtre exposĂ© dans une galerie d’art contemporain, c’est que l’on emmĂšne avec nous ce bagage, cette idĂ©e d’édition. Alors que beaucoup de plasticiens pensent, de maniĂšre fort intĂ©ressante souvent, l’idĂ©e d’exposition, mais ils ont cette sorte de frustration par rapport Ă  l’idĂ©e d’édition. Ils essaient toujours d’avoir un catalogue, une chose Ă©ditĂ©e qui accompagne leur projet, et souvent ce sont mĂȘme eux qui payent l’édition de ce projet. Nous, on arrive avec cette double rĂ©flexion Ă  la fois d’exposition et d’édition, et du coup, Ă  la limite, c’est presque plus facile pour nous. Et par rapport Ă  l’exposition dont tu parles, il y avait beaucoup de choses, c’étaient les dessinateurs de bande dessinĂ©e d’un cĂŽtĂ©, et les plasticiens de l’autre, et on ne voyait pas trop le mĂ©lange, en fait. Xavier Guilbert J’ai une toute derniĂšre question, qui concerne les dates de ces rĂ©fĂ©rences. Parce qu’en dehors des couvertures de Soleil et le catalogue IKEA, toutes les rĂ©fĂ©rences que tu utilises Tintin, HergĂ©, Blake et Mortimer, Martine, les petits formats, on est dans des choses qui datent des annĂ©es 50, 60, 70. Est-ce pour leur statut de classiques», leur valeur symbolique
 Jochen Gerner Non, c’est parce que l’ultra-contemporain, ce que l’on voit aujourd’hui, c’est une sorte de mille-feuilles Ă  la fois du prĂ©sent trĂšs proche, et du passĂ© trĂšs lointain. Donc je travaille sur ce que je vois autour de moi. Globalement, ce qu’on voit autour de nous, ce sont surtout des choses trĂšs anciennes, l’utra-contemporain, c’est assez infime en proportion. Il y a aussi l’idĂ©e de travailler sur quelque chose qui a une sorte de rĂ©sistance au temps, et de maturitĂ©. De voir comment on peut regarder quelque chose de connu par le plus de monde. C’est plus risquĂ© de travailler directement sur quelque chose d’ultra-prĂ©sent, et de prendre du recul. Il y a vraiment cette idĂ©e de — si je suis un gĂ©ologue et que je fais un forage, je m’intĂ©resse aux couches qui sont cachĂ©es, et qui sont les plus anciennes. Ce n’est pas que j’ai un amour ou que j’ai un parcours d’historien, je m’intĂ©resse Ă©normĂ©ment Ă  ce qui se fait actuellement. Mais pour pouvoir comprendre ce qui se fait aujourd’hui, il faut avoir intĂ©grĂ© tout ce qui s’est fait avant. [Entretien rĂ©alisĂ© en public dans le cadre du Festival BD Ă  Bastia le 31 mars 2012.]

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